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Du côté d'Eddie Bellegueule

Quand on ne sait pas, on la boucle. "Je ne sais pas" est la parole professorale, la phrase que les élèves préfèrent chez leur prof, "je ne sais pas" est la parole démocratique par excellence, celle qui permet de ne pas hurler avec les loups contre les immigrants qui se mettent les doigts dans le nez. Au moins taisez-vous. Approchez à votre rythme, choisissez, respectez-vous vous-mêmes, soit, mais ne dénigrez pas, ne dénigrez jamais personne, pas même les égoïstes. Au moins, fermez-là. Ah j'ai l'air fin avec ma morale à deux balles et ma sainteté Carambar. Je m'en fous. Poursuivons : "Je savais comment procéder. Tout était très codifié, déjà chez les enfants que nous étions. L'usage voulait que nous écrivions des lettres, c'était par ce moyen qu'il fallait aborder une fille.J'ai pris une feuille de papier et j'ai griffonné quelques mots, ou plutôt une longue déclaration d'amour sur plusieurs feuillets. Je concluais par une question de type Veux-tu sortir avec moi ? suivie de deux petits carrés sous lesquels j'avais écrit, sous l'un, Oui et, sous l'autre, Non, ayant même pris le soin, dans un post-scriptum, d'ajouter Coche la réponse que tu veux donner. Je suis allé la voir, j'ai traversé la cour et je lui ai tendu la lettre Tu me donneras la réponse. Cette phrase aussi, avec la lettre, faisait partie des codes.

L'attente." Pour moi, la première lettre était dans la poche d'un garçon, qui m'a fui comme la peste ; la deuxième, c'est ma mère qui est tombée dessus et m'a engueulée parce que j'allais rencontrer à Bordeaux une étudiante tout de même plus intéressante que les filles de ploucs du bourg ; et la troisième, la fille l'a fait circuler dans toute la classe pour que tout le monde se foute bien de ma gueule. A chacun son paquet de haine, n'est-ce pas. Faut vivre avec. "Elle tardait à me répondre. Je constatais son hésitation, ses yeux qu'elle baissait lorsque je passais près d'elle. Je suis resté des jours sans un signe ni un mot. Je savais pourquoi elle ne répondait pas. Certaines fois j'aurais voulu non pas dire, seulement dire, mais crier à Laura au milieu de la cour, perché sur un banc, un arbre, qu'importe, lui crier qu'elle était lâche. Qu'elle ne voulait pas de moi parce que accepter ma proposition aurait signifié partager la honte avec moi." Ne t'en fais pas mon vieux, mon premier flirt était la plus moche, et comme on se foutait de moi lorsque j'étais tout seul, eh bien on s'est foutu de nous deux parce que c'était la plus moche avec le plus con.

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Je dis le nom du bled, allez, Mussidan, c'est lâché, comme une merde. Vous savez, c'est difficile d'aimer l'humanité. Très facile en revanche de donner des conseils, voir plus haut. Bref !

"J'ai insisté. J'ai fait d'autres lettres. Elle a finalement accepté.

"Elle m'avait fait transmettre quelques mots par l'une de ses amies. Le rendez-vous était fixé dans le préau du collège en fin d'après-midi, après la classe et avant que chacun prenne les transports scolaires. C'est à cet endroit que se retrouvaient les couples pour s'embrasser chaque jour à la même heure. La pionne avait essayé de les chasser au début Vous vous croyez où, on n'embrasse pas comme ça, comme un spectacle. Ici vous êtes au collège puis elle s'était découragée." Pas un élément pour rattraper l'autre dans cette histoire, et ceci après l'an 2000. Pas la moindre issue dans ce monde de merde.

"Laura m'attendait. Elle n'était pas seule. Le bruit s'était répandu et d'autres étaient présents pour assister à cette scène. Ils voulaient me voir embrasser une fille, voir si tout cela était vrai. Je me suis approché, muet et tremblant." Mais finalement, c'est la connerie de groupe qui est dénoncée, ici... Ah, mais voilà bien de la perspective qui s'ouvre pour nous, en retard ! "Je l'ai emnbrassée, j'ai posé mes lèvres contre les siennes avant de me rendre compte qu'elle essayait d'introduire sa langue dans ma bouche. Je me suis laissé faire; Le baiser a duré plusieurs minutes - je comptais les secondes, me demandant quand cela allait se terminer, si, en tant que garçon, je devais prendre l'initiative de mettre fun au baiser, prendre les commandes, ou attendre. Tout à la fois, je voulais que le baiser dure, je voulais que les autres le voient, le plus d'yeux possible, des foules, des hordes de collégiens." Hélas, Mathias, ça l'a plutôt débecté. Donc il n'était pas fait pour les filles, C trouducul FD. Vous allez lire cette cruelle chronique d'Edouard Louis, En finir avec Eddy Bellegueule. Ca vous apprendra que les gens sont méchants, surtout en groupe : soyez donc solidaires, mais aussi, solitaires.

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