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N'importe quoi hors de propos

Personne ne peut plus montrer des preuves sans se faire opposer des preuves inverses, des calculs sans en recevoir d'autres en pleine poire et qui disent le contraire, tout le monde a raison et tout le monde à tort, et comme dit Montaigne à peu près, "il n'est cause si juste ni si fausse qu'elle ne trouve ses approbateurs et ses détracteurs 10 tonnes, et ceci à l'infini" - donc, il préférait soutenir les catholiques et le roi, et se taire lors du massacre de la St-Barthélémy, silence assourdissant passé sous silence par des commentateurs et thuriféraires bien embarrassés de l'auteur des Essais. Un tel reflux, un tel refus de la raison engendre un conservatisme plombant, "on sait ce qu'on perd mais on ne sait pas ce qu'on gagne", ou bien au contraire une fuite en avant, bougeons, bougeons il en sortira toujours quelque chose, voir l'Education nationale, ou bien, tous vont se replier sur leur communauté ou leur petit cervelet individuel et portatif, depuis celui qui croit avoir raison etevient fanatique, en passant par les sectes, jusqu'au gros j'men-foutisme individualiste et qui, disait Coluche, "ne demande qu'une chose, c'est qu'on ne lui demande rien".

Les trois bras de la Vertu.JPG

Et maintenant, allez-y, gouvernez. A votre tour de prendre des pierres dans la gueule. Car, disait un humoriste américain mort, "si votre aversaire vous écrase du poids de ses arguments, rien n'est perdu : VOUS POUVEZ ENCORE L'INSULTER"' ! Vu que Le Pen se prétend apaisante, Bachar el Assad défenseur des libertés et que madame Pinochet répète que son mari était un grand homme, que voulez-vous que je vous dise ? N'importe quel gouvernement, quel qu'il soit, trouvera toujours en face de lui des empêcheurs de gouverner, qui lui foutront des bâtons dans les roues, multiplieront les manifestations pour tous ou les bloquages de carburant, et qui gueuleront ensuite "on vous l'avait bien dit que ça ne marcherait pas".

Gouverner c'est prévoir ? certes, mais comment un navire comme le Titanic peut-il slalomer à toute pompe au milieu des icebergs sans se fracasser la panse ? Il faudrait à la fois un forte personnalité, avec un ensemble de personnes estimables et estimées, qui pourrait dire parfois "nous nous sommes trompés" sans aussitôt déclencher un tir de feux d'artifice malfaisant de la part de l'opposition qui interpréterait cela comme une reculade, ni pour autant museler la presse ni empêcher qui que ce soit d'aboyer. Il n'y a rien d'original dans cet enfonçage de portes ouvertes. Et Zemmour direz-vous, nous l'avons perdu de vue ? Non. Il affirme lui-même n'être qu'un sismographe, enregistrer comme un miroir stendhalien, mais c'est faux : le moindre de ses propos suinte l'ironie fielleuse et revancharde, personne ne peut rendre compte de la réalité dans toute sa complexité.

Ce qu'il faudrait, alors, c'est du calme, une renonciation à la politique-spectacle, à la guignolisation générale de la société, à la paranoïa des journaux télévisés qui empoisonnent la France depuis des décennies. Mélangeons (Mélenchon, c'est marrant) tous les ingrédients de la raison, du coeur, de la méfiance, de la confiance, mais pour cela, prenons le temps de respirer, de ne pas chercher le conflit à tout pris, un peu de bromure pour tous par pitié, soyons sereins cui-cui, et sincères. La politique n'est pas un combat de boxe. N'exaspérons pas les mauvaises nouvelles, mais ne les passons pas sous silence non plus. Ah c'est dur de tenir le juste milieu sans piquer un roupillon.

Mille excuses pour ce prêchi-prêcha, moi aussi je voulais devenir curé avant ma puberté, c'est curieux j'ai changé, comem Sarko, ou Coppé. On écoute Zemmour, que je n'ai voulu ni défendre ni attaquer, lâchement. De plus, cet ouvrage est largement antérieur aux grandes vagues migratoires catastrophiques pour ceux qui partent ou pour ceux qui refusent, mais c'est top petit chez moi et comme c'est curieux, tout le monde manque d'espace chez soi. N'encensons pas ce trublion de Zemmour, qui n'est ni la Bible ni le Coran ni le Talmud, mais ne l'ensevelissons pas non plus sous les crachats glaireux, attention, je vais lire :

"En devenant une ville-monde, Paris est atteinte de schizophrénie, prenant son autonomie par rapport à l'Etat-nation, tout en continuant à abriter le lieu d'un pouvoir étatique de plus en plus vidé de sa substance.¨Paris - et sa région - continue d'assurer la redistribution à l'échelle nationale, mais sa richesse et ses habitants deviennent de plus en plus extérieurs au reste du pays.

¨"Paris incarne cette France moderne, qui bénéficie des retombées favorables de la mondialisation, chérie à la fois par les élites mondialisées et par les représentants de l'Etat français, ceux-ci désormais inféodés à celles-là. Auparavant, il y avait Paris et, au-delà des fortifs, la Zone. Aujourd'hui, il y a la ville-monde et le reste est "la Zone".

"Paris installe des socialistes rose pâle à sa tête et vote oui à tous les référendums européens, abrite la jeunesse favorisée et diplômée qui ne jure que par la diversité et le multiculturalisme." C'est Braudel qui a parlé pour la première fois de "ville-monde", concentrant l'économie mondiale ; de nos jours, Zemmour mentionne New York, Londres, Tokyo, Francfort, Paris, Shanghaî. A signaler cependant qu'il me semble excessif d'attribuer aux seuls bourges de Paris la disposition d'esprit ci-dessus décrite, qui me semble bien plus relever d'une localisation sociale que d'une localisation géographique.

Il est vrai aussi que les péteux du Vingt-Heures qualifient aussitôt de "village" toute agglomération comptant moins de 10 000 habitants, ce qui est pour le moins exaspérant. "Paris incarne cette France des métroples globalisées, polarisées entre classes supérieures et immigrés, que le reste de la France (classes moyennes et populaires dans le périurbain et les petites villes qui souffrent des délocalisations industrielles et des suppressions de services publics, postes, tribunaux, casernes, hôpitaux, au nom des économies budgétaires) regarde avec un mélange d'envie, de ressentiment, de tristesse, de sentiment d'abandon et d'incompréhension. Les colères de la "manif pour tous" contre le mariage homosexuel, ou la fureur des "bonnets rouges" bretons contre l'écotaxe ont en 2013 exprimé la fureur de la France des parias contre la ville-monde Paris et ses petites sœurs globalisées.

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