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Néron fut peint par Domenico Fetti, au début du XVIIe siècle, illustrant le livre éponyme d'un certain Franzero, Italien écrivant en anglais (1955). C'est un étagement chronologique : 60, 1615, 1956, 2014. Néron est représenté en contreplongée, dans les ocres et les bistres. Le raccourci de perspective nous jette à la gueule d'abord un poing agrippé à un sceptre, lequel forme un angle de 45° avec le rebord de couverture. Nous ignorons si c'est un détail de tableau, ou le tableau entier ; mais Fetti est classé "peintre baroque", mort à 35 ans, son modèle Néron s'étant suicidé à 31. Ce poing, grossier, brutal, impossible à desserrer, s'élargit en avant-bras raccourci, musclé de graisse, blême, crispé sur la prérogative du pouvoir qu'il entend bien ne pas lâcher.

Le retroussis de manche marque le début d'une escalade textile à gros plis rocheux jusqu'à l'épaule, prolongé dans le dos par un drapé rudimentaire. Le vêtement de l'Empereur s'agrafe en avant, sous le cou rond et gras. Alors commence la physionomie d'une brute, d'un fou abruti, couronné d'un laurier jeté là comme une touffe hirsute, correspondant en sombre aux renflures du dos et prolongeant l'ocre jaue en vert noir d'algues malades. Entre la touffe de lauriers et le grassouillet du cou s'étale le plus somptueux visage d'abruti : un double menton veule, une mâchoire mal rasée, une oreille vaste et rose. Le front reste bas, buté, sans trace d'intelligence.

L'œil que l'on voit reste fixe, dardé sur un point inconnu, parallèle aux deux limites du cadre. Le nez, petit, droit, sans caractère. La bouche gourmande et grasse, bloquée par une fossette, une pommette immense. L'expression est lippue, le menton en galoche ronde et surplombant tout le tableau de sa masse énergique et molle : Néron est un méchant gros, un cruel gras. Il semble fardé et parfaitement crétin, surestimé, dangereux. Ce profil dégage une profonde répulsion chez celui qui le regarde. Il dépeint une grosse vache qui doute profondément de sa virilité, de son être, de sa force ou de sa faiblesse, qui en rajoute tant qu'il peut dans l'orgueil et la cruauté, la dissimulation brutale et la raideur molle.

Lâche et féroce, imbu de sa personne au point de prendre ses sursauts de vanité pour un profond sentiment artistique. Aveugle et fou furieux. C'est ainsi que l'Eglise et le sens commun veulent représenter Néron, véritable repoussoir, incarnation de tout ce que l'embonpoint peut avoir de répugnant et de bestial. De ce point de vue, ce tableau est une réussite. Sous le poing et le sceptre, le flanc se recouvre de vert véronèse décomposé (ce peintre mourut en 1588). Un vague baudrier, ou bien la bande d'un tissu, forme avec le sceptre un triangle équilatéral : ici la rigidité géométrique ne laisse place à aucune pitié, à aucune structure humaine ou miséricordieuse, mais s'accorde à toutes ces teintes rompues, malsaines, cadavériques. Cette tête fascinante et poupine, cette mâchoire arrondie, ces traits comme inachevés, nous surplombent de toute leur majesté surjouée, de carton pâte et de chairs morte, de viande avariée. Le visage n'est pas exactement de profil, nous y voyons la jonction animale des sourcils, une ébauche d'orbite gauche, une poursuite d'arrondi dans le menton ; une dégringolade à peine marquée sous la mâchoire , une barbe mal faite plaquée là sur des adiposités nourrissonnes : c'est à de tels traits que fut soumise la Ville de Rome.

N.B. Ce tableau est représenté comme le portrait de Domitien (81-96), autre grand malade

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